Régis Dandoy (@rdandoy)
Politologue à la FLACSO. Chercheur associé à l’ULB et l’UCL
Les tests électoraux (aussi appelés systèmes d’aide au vote ou stemtests) sont ces jeux virtuels où l’électeur – sur base de réponses à quelques questions sur les enjeux de la campagne – se voit indiquer pour quel parti il est (ou devrait se sentir) le plus proche. C’est bien beau et bien gentil, mais c’est réduire le positionnement des partis politiques à quelques questions, sans prendre en compte la complexité de ces enjeux. Qui plus est, ces questions n’ont pas été choisies par les partis ou les candidats eux-mêmes (pour rappel, ce sont eux qui se présentent aux élections), mais par des journalistes et/ou des politologues éclairés. Mais savent-ils vraiment ce qui est important pour chaque électeur individuellement ? Et leur lecture du positionnement d’un parti sur un enjeu de la campagne est-elle identique à celle d’un citoyen lamba ?
Les tests électoraux ne sont donc pas la méthode idéale pour savoir quel est le parti politique qui nous ressemble le plus ou qui met en avant les enjeux qui nous préoccupent le plus. Mais quelle est alors l’alternative ? Les électeurs peuvent-ils faire comme ces journalistes et ces politologues qui ont préparé les questions de ces tests et lire en profondeur les programmes de tous les partis politiques pour toutes les élections ? Suite à nos analyses du contenu des programmes des principaux partis, ce billet se penche sur la faisabilité de la lecture des programmes électoraux par le citoyen bruxellois lamba, en évaluant leur longueur et leur comparabilité.
Des programmes électoraux exclusivement bruxellois ?
Les partis politiques se présentant à l’électeur bruxellois pour les élections régionales ont fait le choix de présenter différents types de programmes électoraux. Certains présentent un programme unique pour les élections régionales à Bruxelles, d’autres ont misé sur une stratégie d’un programme commun pour tous les niveaux de pouvoir – européen, fédéral, régional – tandis que les autres partis ont fait un choix hybride, quelque part entre ces deux scénarios extrêmes. Les programmes électoraux spécifiques à la région wallonne, au fédéral et à l’Europe ne seront pas intégrés à cette analyse.
Tout d’abord, certains partis ont fait le pari de présenter à l’électeur un programme électoral exclusivement bruxellois. Dans ce groupe de partis, nous retrouvons bien évidemment les partis qui ne se présentent qu’aux régionales à Bruxelles comme ProBruxsel (qui présente un programme long, ainsi qu’une version plus courte), FE-MDCEJ, Egalitaires! ou encore Pensio(e)n plus, mais également les partis qui ont rédigé un programme séparé pour chaque élections auxquelles ils participent, comme les FDF, le Parti Pirate, VEGA ou encore Nation. A l’exception des FDF, il s’agit donc de petites formations politiques, présentant généralement un programme bruxellois relativement court.
De l’autre côté, nous retrouvons les partis qui ont rédigé d’un programme commun pour tous les niveaux de pouvoir. Les points et enjeux spécifiquement bruxellois sont dans ce cas intégrés au sein de ce programme, souvent sous la forme d’une section ou d’un chapitre bruxellois. Dans ce groupe de partis, nous retrouvons des partis tels que le Parti Populaire, La Droite, Debout les Belges!, le Parti Libertarien, Gauches communes, BUB ou encore le RWF. Il s’agit également de petites formations politiques, présentant un programme de taille souvent modeste et des listes non complètes en région bruxelloise (voir le billet sur ce sujet ici). Dans ce groupe, nous retrouvons également la N-VA qui a décidé de ne pas rédiger – probablement pour des raisons idéologiques, étant donné que ce parti prône une co-gestion de Bruxelles – de programme bruxellois bien que le parti y présente trois listes (Bruxelles, Flandre et fédéral).
Les autres partis ont choisi une stratégie un peu plus particulière, à savoir rédiger un spécifique programme pour les régionales à Bruxelles, en plus d’un programme commun pour les autres niveaux de pouvoir (avec dans certains cas, un programme spécifique pour l’Europe). Dans ce groupe, nous retrouvons les principaux partis francophones (PS, MR, Ecolo et cdH) et flamands (Open VLD, sp.a, CD&V et Groen), Parmi ces partis, nous retrouvons également deux plus petites formations politiques, à savoir le PTB-go! et Rassemblement R.
Des milliers de pages... Que lire ?
Vous voulez lire les programmes électoraux de tous les partis se présentant à Bruxelles ? Préparez-vous donc à lire… 4.744 pages ! Cela correspond au nombre total de pages des programmes pour la région Bruxelloise ainsi que les programmes communs (pour Bruxelles mais également les autres niveaux de pouvoir).
Mais il y a moyen de réduire cette quantité d’informations en laissant de côté les programmes communs région – fédéral – Europe lorsque le parti rédige a rédigé plusieurs programmes en parallèle et en ne lisant que leur programme spécifiquement bruxellois. Certains partis ont également rédigé des résumés pour leurs programmes bruxellois et/ou de leur programme commun. Si vous ne souhaitez lire que versions bruxelloises et/ou résumées de ces programmes pour ces partis, le nombre de pages à lire diminue à 1.148 pages, ce qui reste toutefois considérable.
Bref, il vous reste une nuit avant les élections du 25 mai, vous avez maintenant quoi lire si vous n’arrivez pas à dormir…
Tableau. Taille des programmes électoraux à Bruxelles
Programme bruxellois
|
Programme bruxellois (résumé)
|
Programme commun (EU, fédéral, Bruxelles)
|
Programme commun (résumé)
|
|
Partis francophones
|
||||
MR
|
70 pages
|
-
|
565 pages
|
77 pages
|
PS
|
155 pages
|
28 pages
|
503 pages
|
53 pages
|
Ecolo
|
13 pages
|
-
|
810 pages
|
65 pages *
|
cdH
|
106 pages
|
-
|
615 pages
|
192 pages
|
FDF
|
208 pages
|
-
|
-
|
-
|
Pro Bruxsel
|
44 pages
|
6 pages
|
-
|
-
|
PTB-Go!
|
64 pages
|
-
|
123 pages
|
104 pages
|
PP
|
-
|
-
|
91 pages
|
|
VEGA
|
15 pages
|
-
|
-
|
-
|
La Droite
|
-
|
-
|
4 pages
|
-
|
Debout les Belges!
|
-
|
-
|
9 pages
|
-
|
Gauches communes
|
-
|
-
|
5 pages
|
-
|
Nation
|
13 pages
|
-
|
-
|
-
|
Parti Libertarien
|
-
|
-
|
63 pages
|
-
|
Egalitaires!
|
2 pages
|
-
|
-
|
-
|
Islam
|
-
|
-
|
20 pages
|
-
|
BUB
|
-
|
-
|
21 pages
|
-
|
RWF
|
-
|
-
|
14 pages
|
-
|
R
|
13 pages
|
11 pages
|
-
|
|
FE-MDCEJ
|
2 pages
|
-
|
-
|
-
|
Pirate
|
31 pages
|
-
|
-
|
-
|
Partis Flamands
|
||||
Open VLD
|
41 pages
|
-
|
56 pages
|
-
|
sp.a
|
76 pages
|
-
|
286 pages
|
19 pages
|
Vlaams Belang
|
76 pages *
|
-
|
40 pages
|
-
|
CD&V
|
52 pages
|
-
|
55 pages
|
-
|
Groen
|
97 pages
|
7 pages
|
317 pages
|
-
|
N-VA
|
-
|
-
|
96 pages
|
-
|
ProBruxsel N
|
2 pages
|
-
|
-
|
-
|
Note : * Dans certains cas, le programme électoral n’est pas disponible dans un seul document, mais consiste en une agrégation de différents chapitres. Le nombre de pages est donc comptabilisé sur ces différents chapitres agrégés dans un document Word. Le résumé du programme Ecolo consiste en une table des matières de toutes les propositions. Le document utilisé pour l'analyse du Vlaams Belang n’est pas un véritable programme mais le texte issu du congrès national "Brussel. morgen onze stad" tenu par le parti en décembre 2013.